Paris, Tokyo, Londres, New-York, Texas et même la plus petite ville d'Afrique ne me fera pas oublier ce manque que je ressens. Cette douleur dans ma poitrine et ces nombreuses pilules qui jonchent sur le sol dans l'espoir d'effacer ne serait-ce qu'une heure ce souvenir qui me ronge. Vingt et un. Vingt-et-un ans que j'ai vu le jour dans un hôpital quelconque dans la capitale française. Bientôt deux ans que j'apprends à vivre sans toi et bordel, si tu savais comme c'est dur ! J'ai peur. Peur de fermer les yeux et revoir cette scène. Cette chambre qui sombre dans le noir et ce sang sur les murs. Ce putain de flingue dans ta main que j'avais laissée dans notre chambre juste pour me sentir en sécurité. J'essaye de savoir pourquoi. Pourquoi tu as décidé de me laisser du jour au lendemain. J'avais pourtant senti ta détresse dans ton regard qui me suppliait de te sauver, mais on faisait tout pour se voiler la face. Tu ne trouve pas qu'on était bien allongé par terre à la belle étoile, moi entre tes jambes, nos mains liés. Oui, on n' avait pas forcément besoin de cachets pour planer, on y arrivait très bien à deux. J'aurais tellement aimé pouvoir te raisonner, mais les nombreux coups m'ont fait renoncer. Je me revois dans cette chambre, tous devient flou, mes mains tremble, je sentais mon poids se dérober sous moi. Je suis totalement aveuglé. Colère (tu m'as lâché !), peine (tu vas me manquer !), incompréhension (pourquoi tu as fait ça bordel ?!). Je saccage toute la salle de bain. J'emmène tous. Cocaïne, LSD, cannabis, héroïne, dolipranes, tous ce que je peux trouver. Je n'avais jamais imaginé qu'on pouvait rentrer tout ça dans un seul placard. Je t'en veux de m'avoir laissé, je m'en veux de ne pas avoir pu te sauver et je m'en veux de ne pas trouver le courage de te rejoindre et ce n'est pas faute d'avoir essayé. À présent ma vie est foutue. Je n'arrive plus à avancer et j'accumule conneries sur conneries. Tu ne me croirais pas si je te disais que j'ai presque failli tuer un mec hier avant de quitter le Massachusetts. Il faut dire qu'il l'avait bien cherché en m'insultant. Toi-même tu sais que j'ai un très bon coup droit et il faut dire que les entraînements de football et la boxe m'ont pas mal aidé.

Aujourd'hui je m'en vais au Bahamas dans l'espoir de pouvoir me reconstruire, pouvoir avancer. Tu sais que tu m'en empêche et putain je sens que t'es fier de toi de là-haut. Je m'en veux de ne pas réussir à me détacher de toi ! Pendant ce voyage en avion je me remémore les bons moments passer aux bras de ma famille dans ma superbe villa, au centre équestre avec Vanelope ma jument, mais surtout nos moments. Lorsque tu faisais exprès de te mettre sur la route afin de savoir l'importance de mon amour envers toi et putain cque t'étais con de faire ça ! J'aurais peut-être dû y voir une détresse dans chacun de tes gestes et pourtant qu'est-ce qu'on était heureux ensemble. Plus rien existait à par un NOUS. Je me souviens que tu avais la fâcheuse tendance à toujours manger la mie avant d'entamer ton pain ou bien refaire le lit avant de te coucher. Je ne compte plus mes nuits blanches passées sans toi et je crois qu'une fois arrivé j'arrêterais aussi de compter les jours. J'en ai fini ! Je vais essayer d'avancer et ce dès maintenant. L'avion atterri, le soleil tape sur le sable jaune et je sens déjà l'odeur des vacances venir à moi. Je remercie la personne ayant eu la générosité de bien vouloir m'aider à descendre ma valise tandis que je poste mes premiers pieds sur cette terre pour le moment inconnu. Je ne sais pas combien de temps je resterais ici et je ne sais pas combien de faux sourires je devrais encore fournir pour cacher mon manque, mais la première question que je me poste c'est s'ils ont de bons dealers dans le coin.
Trois comprimés et une latte le matin, trois l'après-midi, deux joins toutes les heures, une pilule le soir. Régime très stricte que je suis depuis maintenant deux ans. J'ai oublié l'idée de ne pas te décevoir, je sais que c'est déjà trop tard et tu sais quoi ? C'est le seul moyen de me rapprocher de toi. De me rapprocher de la mort, donc de toi...Exactement de la même manière lorsque la lame tranche ma peau sur ma cuisse. Ce sang me rassure. Je me demande ce que tu as ressenti avant. Avais-tu peur ? As-tu pensé à moi ? Aux conséquences que ça pouvait avoir ? Et après ? Etais-tu soulagé ? As-tu eu mal ? Regrettais-tu ? A quoi bon torturer mon esprit sachant que je n'aurais jamais de réponses.

Moi, Samantha Johnson, née un certain vingt-quatre décembre 1991, vingt-et-un ans aujourd'hui, parce qu'il te suffis d'un jour pour détruire une vie et toute une vie pour la reconstruire, parce que je suis impulsive, perdue, renfermée, agaçante, une vraie bitch quand j'en ai décidé, capricieuse et accro aux petites pilules ainsi que tout ce qui est susceptible de pourrir la santé de l'être humain, parce que les Bahamas m'appartiennent à présent, parce que maintenant que je suis là, il vous faudra toute une vie pour vous débarrassez de moi.