"Today is the day"

« She’, tu es sure que ça va ? », sortis-je à mon amie d’enfance, les yeux écarquillés, considérant le fauteuil dans lequel elle était assise. Je savais bien que nous étions au beau milieu d’une conversation totalement autre, sauf que soudainement, mon regard s’était porté vers le fameux canapé, qui était plus foncé à certains endroits, comme si quelqu’un y avait renversé un liquide ou avait carrément fait pipi dessus. Considérant que j’étais persuadée que ce n’était ni l’un ni l’autre dans le cas de Sherrie, j’avais préféré la prévenir, et en attendant sa réponse, je me préparais déjà à aller chercher mes clés de voiture et tout le nécessaire, compte tenu que si quelqu’un devrait l’emmener à l’hôpital, ce serait moi, puisque Kheyran, son mari, était parti en mission. C’était d’ailleurs pour cela que j’étais venue à la base ; lui tenir compagnie pour m’assurer que rien n’allait lui arriver pendant ce temps. Visiblement, j’avais bien choisi mon temps, si l’expression était appropriée pour cette situation.

"Today is the day"

Dès que je vis l’air paniqué de Sherrie lorsque je lui fis remarquer que son siège était trempé, je sus que j’avais visé juste : Elle n’avait rien renversé et ne s’était pas fait dessus, elle venait tout simplement de perdre les eaux, et de ce fait, il fallait que quelqu’un l’emmène à l’hôpital le plus rapidement possible. Idéalement, ce serait là le rôle du paternel, mais je ne savais pas où était Kheyran, et mon amie non plus, visiblement. Puis, l’évidence me sauta aux yeux lorsque Sherrie me le demanda : C’est moi qui devrais l’accompagner à l’hôpital pour son accouchement. Un peu terrifiée par cette idée, puisque jamais je n’avais fait tous les préparatifs pour aller à la maternité, compte tenu que c’était James qui s’en était occupé les deux fois, je restai pantoise un moment, mais je ne pouvais pas laisser mon amie d’enfance toute seule. Vivement, je hochai la tête à la positif, pris mes clés de voiture, et je dis : « Ton sac, pour la maternité, il est où !? » En effet, dans l’idéal, il faudrait que Sherrie ait un sac avec des vêtements pour elle ainsi que pour le bébé, ainsi que d’autres bricoles essentielles. Ça, je le sais, c’est moi qui l’avais fait en grande partie lors de la naissance d’Everleigh. Cependant, je savais que malgré les conseils que je n’avais cessé de donné à mon amie, j’ignorais si elle avait pris en considération le fait de préparer un sac, donc un peu stressée aussi, je dis : « Tu as un sac de prêt, au moins, dis-moi ? »

"Today is the day"

Je soupirai rapidement de soulagement lorsque Sherrie me dit que son sac était prêt, suffisait de le prendre dans sa chambre. Je me serais bien mal vue empaqueter des affaires, surtout que ce n’était pas pour moi, et même si je savais quoi apporter à la maternité, je ne savais tout de même pas où mon amie rangeait toutes ses affaires. Sitôt que je déboulai dans sa chambre, je trouvai le sac, et je vérifiai rapidement à l’intérieur pour vérifier que c’était bel et bien celui-ci. Je le mis sur mon épaule, puis je retournai au salon, pris mon sac à main, et aida mon amie en lui répondant : « C’est normal voyons, je n’allais pas te laisser plantée là, ni mon filleul d’ailleurs… » M’assurant qu’elle arriverait à se rendre à la voiture, avec un peu d’aide, je lui conseillai, tandis que nous sortions de l’appartement pour prendre l’ascenseur : « Respire, le plus profondément que tu peux. Tu vas t’installer à l’arrière de la voiture, d’accord ? Tout va bien aller, je te le promets… », m’efforçant de ne pas me montrer inquiète, puisque je n’avais jamais fait ça dans ce sens, j’espérais seulement que j’allais pouvoir faire mon possible pour que l’accouchement de mon amie se déroule le mieux possible.

"Today is the day"

Ma nervosité ne fit qu’augmenter lorsque j’entendis mon amie me dit qu’elle ne se sentait pas bien, craignant soudainement que quelque chose ne se passe pas bien, ce que je ne voudrais certainement pas, puisque je ne me le pardonnerais jamais, et Sherrie non plus sûrement. Je m’assurai qu’elle ne tomba pas dans les vapes, continuant de lui dire : « Respire, le plus possible… » tout le temps que nous fûmes dans l’ascenseur. Je l’aidai ensuite à s’installer à l’arrière de la voiture. C’est seulement lorsque je fus assurée qu’elle était bien allongée sur je me rendis du côté passager, et sans attendre, je m’empressai d’aller du côté conducteur, le sac de maternité de Sherrie sur le banc passager, je mis la clé dans le contact, et je pris le plus rapidement possible la route de l’hôpital, jetant de temps à autre des coups d’œil dans le rétroviseur pour voir si mon amie allait toujours bien, ne sachant toujours pas comment James avait pu faire pour résister comme ça, deux fois en plus. Heureusement, l’hôpital apparut peu de temps après dans mon champ de vision. Je cherchai alors la place de parking la plus près possible de l’entrée, et sitôt immobilisée, je demandai  à Sherrie en me retournant : « Tu peux marcher ou je vais te prendre un fauteuil ? »

"Today is the day"

Dès que j’eus réponse à ma question, j’aidai Olivia à sortir de la voiture, balançant le sac de maternité sur mon épaule. Même si elle a refusé de s’asseoir dans un fauteuil que j’aurais poussé, je reste tout de même près d’elle afin de la soutenir en cas de besoin, et surtout, une fois que nous sommes entrées, je m’empresse de trouver l’accueil de la maternité qui est, Dieu merci, pas très loin. De ce fait, lorsque mon amie me demande où aller, je ne tarde pas à lui pointer la direction en disant : « Juste là. Allez, plus que quelques mètres. » En effet, peu de temps après, nous arrivions à l’accueil. Je me portai volontaire pour expliquer que mon amie allait accoucher, et sitôt Olivia fut prise en charge par des employés de l’hôpital, et moi, à mon plus grand désespoir, on me demanda de rester dans la salle d’attende, l’accès n’étant pas permis aux simples « amis ». En rogne contre les employés, mais aussi contre Kheyran qui n’était pas là pour la naissance de son fils indirectement, je ne me débattis pas, mais je lâchai un « Vas-y Liv’, sois forte, tu peux le faire ! » avant de la voir disparaitre de mon champ de vision.

"Today is the day"

Une fois que je perds Olivia de vue, j’essaie de me calmer en faisant les cent pas, mais je n’y arrive pas pour les premières minutes. C’est seulement lorsque je décide de sortir un peu dehors et appeler mon mari pour lui expliquer la situation que je peux finalement me calmer un peu, sa voix étant probablement pour moi la meilleure source de réconfort que je peux avoir. Ensuite, je ne me souviens plus ce que j’ai fait; j’ai lu, j’ai somnolé, j’ai mangé un peu, mais qu’importe, je sais que le temps fut long avant que finalement, un médecin vienne me chercher pour que je le suive jusqu’à une chambre, celle d’Olivia. J’entrai doucement, et je fus aussitôt charmée par le spectacle que je vis, à savoir mon amie avec son petit Enzo dans les bras. Émerveillée, je m’approchai doucement, et je chuchotai à l’adresse d’Olivia : « Il est adorable… Tu as fait du bon boulot… » J’adresse un sourire à Enzo, et je regarde mon amie pour lui demander : « Comment ça s’est passé ? Tu te sens bien ? »

"Today is the day"

Pendant un instant, j’ai l’impression de me reconnaitre au travers d’Olivia, de revoir l’émerveillement que j’ai ressenti au moment de mon accouchement, au moment de prendre mes enfants dans mes bras pour la première fois. Si je savais que c’était un instant magique, je savais maintenant que même de l’extérieur, il n’y avait probablement rien de plus beau, et cela me fit sourire tendrement tandis que mon amie me disait qu’elle était crevée et qu’elle avait mal, ce qui ne me surprit pas vraiment. Je compatissais, après tout, je l’avais vécu deux fois. Par curiosité, je lui demandai : « Ils t’ont fait une péridurale ? » avant de reporter mon regard sur le petit Enzo qui semblait déjà se plaire contre sa maman. Sitôt, une idée me vint à l’esprit. Je pris mon sac et sortit mon téléphone portable. Avant de faire quoi que ce soit toutefois, je demandai à Olivia : « Vous êtes superbes, tous les deux. Tu me laisses prendre une photo ? Ça te fera un souvenir, et je pourrai l’envoyer à Kheyran, si tu veux bien… »

"Today is the day"

Pour tout avouer, j’étais soulagée de savoir qu’Olivia avait choisi de prendre la péridurale pour son accouchement. Au moins, elle n’avait pas eu mal comme moi à la naissance de Lexie et Christopher, compte tenu que l’état d’urgence et la naissance prématurée des enfants avaient empêché quelconque tentative d’anesthésie. Pour lui faire savoir ce soulagement, je lui fis un petit sourire en coin, sourire qui disparut quelques peu lorsque je vis la réaction de mon amie à ma proposition. Je regrettai alors d’avoir parlé de Kheyran pendant un instant, mais n’abandonnant pas mon idée pour mon premier argument, je gardai mon téléphone dans ma main, et je pris cette toute première photo d’Olivia et Enzo, ne procédant toutefois pas maintenant à l’envoi du message. Je rangeai le téléphone dans ma poche, et je repérai une chaise à côté du lit d’Olivia, chaise où je décidai de m’installer. Marmonnant   « Il ne sait pas ce qu’il rate en tout cas… », je portai mon regard sur le petit Enzo à nouveau, alors que celui-ci faisait une petite grimace à peine perceptible, mais tout simplement adorable. Je souris d’attendrissement, et je dis, à la fois pour moi-même et pour mon amie : « Regarde moi ça… il est trop chou ! »

"Today is the day"

Je commençai à rire doucement, tout en m’efforçant de ne pas faire trop de bruit, lorsqu’Olivia me dit que son fils retenait d’elle. Je posai mon regard sur le principal concerné une nouvelle fois, pour approuver les propos de mon amie; en effet, il lui ressemblait, mine de rien ! Cette pensée me fit alors sourire, et je conservai ce sourire jusqu’à ce qu’Olivia me propose de prendre Enzo. Je pris alors un air plutôt gênée, ne voulant pas interférer dans ces premiers instants entre une mère et son bébé naissant, même si prendre un bébé, surtout aussi petit, c’était difficile de résister. En guise de réponse, je me mordillai la lèvre inférieure, et je dis, hésitante : « Tu… Tu es sûre ? »

"Today is the day"

Même si Olivia me dit que cela ne l’embêtait pas, j’hésitai encore en jetant un coup d’œil à Enzo, il semble si bien dans les bras de sa mère, je ne veux surtout pas gâcher ce moment, son premier véritable contact avec Olivia, qui était si important. Pourtant, mon amie me connaissait trop bien sur ce point, ce n’était pas l’envie qui me manquait de le prendre, moi qui aimait tant les bébés. Je me mordillai la lèvre, et finalement, au bout de quelques secondes d’hésitation et de torture, je lâchai finalement : « T’as raison, j’en meurs d’envie… Mais je vais le prendre après son premier boire, parce que tu vas voir, il va avoir faim bientôt, je te l’assure. D’accord ? »